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De l’Ozempic pour traiter le diabète de type 1?

Vous avez sans doute entendu parler de l’Ozempic, mis de l’avant par plusieurs personnalités publiques comme « traitement miracle » pour perdre du poids. Que ce soit sur TikTok, YouTube, Facebook ou Instagram, l’Ozempic est sur toutes les lèvres ces temps-ci. Pourtant, ce médicament injectable n’a pas été conçu et n’est pas indiqué pour ses vertus amaigrissantes. Au Canada, il a été approuvé pour aider les personnes vivant avec le diabète de type 2 (DT2) à mieux gérer leurs glycémies.

Selon une récente étude américaine, ce médicament populaire pourrait, en revanche, devenir un outil révolutionnaire pour traiter le diabète de type 1 (DT1). Son ingrédient actif, le sémaglutide, pourrait en effet permettre de retarder le début du traitement par insuline.

Qu’est-ce que l’Ozempic?

Il s’agit d’un médicament très efficace utilisé dans le traitement du DT2 pour réduire les glycémies sans danger d’hypoglycémie et pour diminuer le risque d’événements cardiovasculaires chez les personnes ayant déjà eu de tels problèmes (p. ex. infarctus). Son ingrédient actif, le sémaglutide, a une action similaire à celle d’une protéine produite par le tube digestif (GLP-1 qui signifie glucagon-like peptide-1) après les repas. Il aide le pancréas à produire plus d’insuline et réduit la production de glucagon (l’hormone qui fait monter le taux de sucre) lorsque la glycémie est élevée. Également, cette molécule contribue à ralentir la vidange de l’estomac et à réduire l’appétit en jouant à la fois sur la sensation de faim et le fait de se sentir plus rapidement rassasié. C’est la combinaison de ces effets qui permet de faire flancher la balance : les personnes qui prennent l’Ozempic perdent en moyenne 6 % de leur poids initial. Des données provenant d’études animales suggèrent en outre que le sémaglutide pourrait protéger les cellules bêta du pancréas, qui sont responsables de la production d’insuline.

Grâce à ces résultats, l’Ozempic est devenu le premier traitement injectable pour les personnes qui vivent avec le DT2. Il est proposé lorsque le taux de sucre n’est pas bien contrôlé par les médicaments oraux. Au Canada, il est disponible sous forme de stylos préremplis (doses variant entre 0,25 mg et 1 mg, une injection une fois par semaine).

Le sémaglutide pourrait remplacer l’insuline en début de DT1

Des chercheurs ont évalué l’impact de l’Ozempic sur quelques personnes vivant avec le DT1. Lorsqu’une personne reçoit un diagnostic de DT1, son pancréas a souvent encore quelques cellules bêta intactes qui produisent un peu d’insuline. Selon une récente étude américaine publiée dans le New England Journal of Medicine, 50 % des cellules bêta du pancréas peuvent encore être actives au moment du diagnostic. L’hypothèse de départ de cette étude était qu’en intervenant rapidement lors du diagnostic de DT1, le sémaglutide pourrait potentiellement remplacer l’insuline aux repas, vu qu’il stimule la production de cette hormone et offre fort probablement une certaine protection aux cellules qui la produisent. Entre 2020 et 2022, les chercheurs ont donc mené un essai sur 10 personnes âgées de 21 à 39 ans. Toutes avaient reçu un diagnostic de DT1 il y a moins de 6 mois.

Le traitement recommandé pour le DT1 a été débuté, soit de l’insuline rapide à chaque repas et de l’insuline de longue durée d’action pour couvrir les besoins la nuit et entre les repas. Les participants ont également reçu de petites doses de sémaglutide (0,125 mg). Puis, graduellement, le dosage de sémaglutide a été augmenté (jusqu’à 0,5 mg) et celui de l’insuline diminué pour éviter les hypoglycémies.

En l’espace de trois mois, plus aucun des participants n’a eu besoin d’insuline avant les repas pour maintenir une glycémie dans la cible (entre 4 mmol/L et 10 mmol/L). Après 6 mois, l’insuline de longue durée d’action a pu être arrêtée pour 7 patients sur 10. Cette stratégie a été maintenue pour les 12 mois suivants.

Les résultats sont plutôt prometteurs : l’hémoglobine glyquée (moyenne des glycémies dans les 3 derniers mois) est passée de 11,7 % lors du diagnostic à 5,9 % après 6 mois et à 5,7 % après 12 mois. 

Un traitement révolutionnaire pour le DT1?

Nous n’en sommes pas encore là. Il manque à cette étude un groupe contrôle de participants qui prendraient un placebo de sémaglutide (même stylo mais sans produit actif), afin de déterminer le réel impact de la molécule. De plus, le phénomène de la « lune de miel », qui est la capacité de réduire, voire d’arrêter l’insuline au début du DT1, est bien connu même sans sémaglutide. Il faudra donc d’autres études sur une population plus large, avec un groupe contrôle et sur plus long terme, pour confirmer les résultats obtenus par les chercheurs américains.

Si tel était le cas, le sémaglutide pourrait devenir le traitement de prédilection au cours des premières années suivant le diagnostic. Il restera ensuite à préciser quelle sera sa place dans la prise en charge à long terme de la maladie. Il semble toutefois probable que le sémaglutide puisse faciliter et améliorer la gestion des glycémies pour certaines personnes qui vivent avec le DT1.

En effet, il existe des études qui ont montré que le sémaglutide peut entraîner une baisse de l’hémoglobine glyquée (HbA1c) de 0,3 à 0,5 % et une perte de poids comparable à celle observée chez les personnes qui vivent avec le DT2. Diabète Canada indique que ce type de traitement peut être utile pour certaines personnes qui vivent avec le DT1 comme celles qui développent une résistance à l’action de l’insuline et qui ont donc besoin de doses importantes. Toutefois, Santé Canada ne reconnaît pas cette utilisation. Dans le registre BETTER, un peu moins de 5 % des participants utilisent du sémaglutide.

Une chose est certaine, vous entendrez beaucoup parler de ce traitement dans les prochaines années. Surtout avec l’arrivée prochaine du Mounjaro, un nouvel outil pour les personnes qui vivent avec le DT2 ou de l’obésité. Son ingrédient est la molécule tirzépatide dont l’action est proche de celle du sémaglutide, mais qui permet une baisse plus marquée des glycémies et du poids.

Les promesses du sémaglutide pour la perte de poids

Le sémaglutide existe aussi sous un autre nom correspondant à des dosages plus élevés, soit le Wegovy. Ce traitement existe sous forme de stylos préremplis de 2,4 mg. Il ne permet pas d’obtenir une baisse additionnelle de la glycémie, mais il majore significativement la perte de poids. Au Canada, le Wegovy est autorisé par Santé Canada comme une des options dans la prise en charge de l’obésité, même sans diabète associé, mais il n’est toujours pas disponible sur le marché canadien. En effet, le succès du sémaglutide a provoqué des pénuries dans plusieurs pays, dont le Canada.

Il faut savoir toutefois que le sémaglutide n’est pas un traitement miracle pour maigrir. Selon les études, les personnes en surpoids vont en moyenne perdre 8 kg (17,6 lb) après un an avec l’Ozempic et 15,9 kg (35 lb) avec le Wegovy si elles adoptent de saines habitudes de vie (c.-à-d. bonne alimentation, exercice physique, etc.). Sans changements de mode de vie, le poids perdu est souvent repris à l’arrêt des injections.

Le traitement peut aussi provoquer des effets secondaires indésirables handicapants pour plusieurs personnes, soit des nausées, des vomissements, des douleurs abdominales et des diarrhées. Enfin, il y a quelques contre-indications, notamment le fait d’avoir déjà eu une pancréatite (inflammation majeure du pancréas).

Références :

AAS. (2023) EurekAlert! After treatment with semaglutide, newly diagnosed Type 1 diabetes patients needed little or no insulin. News release. https://www.eurekalert.org/news-releases/1000574

Everyday Health. (2023) Ozempic May Reduce Need for Insulin in New Type 1 Diabetes Patients. Diabetes Daily. Consulté le 26 septembre 2023. https://www.diabetesdaily.com/blog/ozempic-may-reduce-need-for-insulin-in-new-type-1-diabetes-patients-713943

Monographie de l’Ozempic. Novo Nordisk. Consulté le 26 septembre 2023. https://caf.novonordisk.ca/content/dam/nncorp/ca/fr/products/ozempic-consumer-information-fr.pdf

Gouvernement du Canada. (mise à jour du 18 août 2023) Approvisionnement et utilisation d’Ozempic. Page consultée le 26 septembre 2023. https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/medicaments-produits-sante/medicaments/penuries-medicaments/information-consommateurs/avis-approvisionnement/ozempic.html

Écrit par : Nathalie Kinnard, rédactrice scientifique et assistante de recherche

Révisé par :

  • Rémi Rabasa-Lhoret, M.D., Ph. D.
  • Domitille Dervaux, Claude Laforest, Michel Dostie, Amélie Eloundou, Jacques Pelletier, patients-partenaires du projet BETTER

Révision linguistique réalisée par : Marie-Christine Payette