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L’alimentation intuitive et consciente dans le diabète de type 1

Dans notre société, la mode, les médias sociaux et la publicité jouent un rôle important dans notre rapport avec l’alimentation. Manger « sainement », « contrôler son poids », sont autant d’injonctions qui peuvent influencer notre relation avec la nourriture. 

Le diabète de type 1 (DT1) est une maladie chronique qui met l’alimentation au centre des préoccupations. En effet, comme le pancréas n’est plus en mesure de sécréter l’insuline, les personnes qui vivent avec le DT1 doivent constamment calculer les glucides contenus dans leur repas pour administrer de l’insuline en conséquence. En plus du calcul des glucides, ces personnes peuvent également être confrontées à des situations où elles sont obligées de manger pour maintenir leur taux de sucre dans les cibles (p. ex., en cas d’hypoglycémie), ou encore à recevoir des commentaires stigmatisants en lien avec l’alimentation (p. ex., tu ne devrais pas manger ça, car tu vis avec le DT1).

Cette grande attention portée sur l’alimentation, parfois dès le plus jeune âge, peut parfois amener la personne à perdre de vue l’équilibre alimentaire, le plaisir de manger, les signaux de faim et de rassasiement, et complexifier la relation avec l’alimentation. 

C’est dans ce contexte et pour cette raison que les concepts d’alimentation intuitive et d’alimentation consciente peuvent être intéressants. 

De quoi parlons-nous?

Si elles comportent des similitudes, l’alimentation intuitive et l’alimentation consciente sont deux approches différentes pour caractériser l’acte alimentaire. En voici les grandes lignes :

L’alimentation intuitive est une approche qui consiste à écouter son corps et ses signaux de faim et de rassasiement pour décider quand et quoi manger. L’objectif est de se reconnecter avec ses sensations corporelles et de s’affranchir des régimes restrictifs et des règles alimentaires rigides. Les grands principes de l’alimentation intuitive comprennent :

  • Manger selon sa faim : cela implique d’apprendre à reconnaître et respecter les signaux de faim et de rassasiement de son corps et de manger en conséquence.
  • Manger sans culpabilité : l’alimentation intuitive encourage à se libérer de la culpabilité associée à la nourriture et à se concentrer sur la satisfaction de ses besoins.
  • Honorer ses envies : cela implique de manger des aliments que l’on aime et qui nous font plaisir, sans jugement ni restriction.
  • Se connecter avec son corps : il s’agit d’apprendre à être attentif à ses sensations corporelles et à les utiliser comme guide pour prendre des décisions alimentaires (p. ex., choisir un plat réconfortant si c’est ce dont nous avons besoin).
  • Être indulgent avec soi-même : il est important de se rappeler que l’alimentation intuitive est un processus d’apprentissage, et qu’il est normal de faire des erreurs.

D’un autre côté, l’alimentation consciente est une approche qui consiste à être présent et attentif lorsqu’on mange, en se concentrant sur les sensations, les odeurs, les goûts et les textures de la nourriture. L’objectif est de s’affranchir de distractions telles que la télévision ou les réseaux sociaux, pour se concentrer sur l’acte de manger. Les grands principes de l’alimentation consciente comprennent :

  • Être présent : cela implique de se concentrer sur la nourriture et les sensations du moment présent, sans distraction.
  • Être attentif à ses sensations : il s’agit d’être attentif aux sensations de faim, de rassasiement, de plaisir et de satisfaction qui accompagnent l’acte de manger.
  • Prendre son temps : cela implique de manger lentement et de savourer la nourriture, en prenant le temps d’apprécier les différentes textures et saveurs.
  • Être curieux : il est important de rester curieux et ouvert d’esprit quant à la nourriture, en explorant de nouveaux aliments et de nouvelles saveurs.
  • Être bienveillant envers soi-même : il s’agit de se libérer de la culpabilité et de la honte associées à la nourriture, et de se concentrer sur le plaisir et la satisfaction qu’elle peut apporter.

Est-ce possible d’appliquer ces concepts dans le DT1?

Devoir surveiller la quantité de glucides dans l’alimentation peut sembler contradictoire avec ces deux approches qui mettent l’accent sur l’écoute des besoins, des sensations et des envies alimentaires. Pourtant ces concepts s’adressent à tout le monde, y compris aux personnes vivant avec le DT1.

Manger intuitivement ou consciemment ne signifie pas manger sans tenir compte du diabète ou de la glycémie. Il est en effet toujours nécessaire de surveiller cette dernière, de calculer les glucides et de réfléchir à l’impact des aliments sur la glycémie. 

Ces approches peuvent cependant aider à retrouver la confiance dans les choix alimentaires et permettre au corps d’émettre des signaux indiquant quand, quoi et quelle quantité manger. Elles visent à promouvoir la santé en plaçant la santé mentale au même niveau que la santé physique.

Si ces approches ont démontré des bienfaits dans la gestion du diabète de type 2 (p. ex., amélioration des glycémies, perte de poids), rares sont les études menées en lien avec le DT1. Une étude menée chez des adolescents vivant avec le DT1 démontre cependant que l’hémoglobine glyquée (HbA1c) était meilleure chez ceux qui pratiquent l’alimentation intuitive et consciente.

En pratique

Voici un exemple afin de mieux comprendre comment appliquer l’alimentation intuitive et consciente au quotidien. Plutôt que de choisir un plat en fonction de sa teneur en glucides, une approche intuitive et consciente encouragerait la personne à se poser les questions suivantes : « Quel est mon niveau de faim? Qu’est-ce que j’ai vraiment envie de manger? Vais-je me sentir contraint si je choisis autre chose? Une fois le choix fait, la dose et le moment de prise de l’insuline peuvent être ajustés ». En cas de doute sur la portion qui sera consommée, il est possible de donner un peu moins d’insuline, quitte à en redonner par la suite.

Il faut ensuite prendre le temps de savourer la nourriture en toute conscience (sans distraction) en mangeant lentement, en déposant ses ustensiles entre les bouchées et en mâchant bien. Le corps a besoin d’un certain temps avant d’émettre des signaux de rassasiement. Puis, il faut écouter ces signaux et cesser de manger, même s’il en reste dans l’assiette. 

Ces approches impliquent également d’éliminer les jugements que l’on pourrait avoir vis-à-vis la nourriture, y compris ceux en lien avec le calcul des glucides. Cela implique de remettre en question l’idée que les glucides sont intrinsèquement mauvais parce qu’ils affectent le taux de sucre dans le sang. Si on ajuste la dose d’insuline en fonction des glucides, c’est en effet pour avoir la liberté de pouvoir en manger! 

De plus, l’alimentation intuitive et l’alimentation consciente rejettent l’idée d’« aliments interdits ». Restreindre un aliment ou un groupe d’aliments en particulier peut avoir pour effet d’être obsédé par celui-ci. Cette obsession peut faire en sorte qu’on perde le contrôle vis-à-vis cet aliment et qu’on en mange au-delà d’une sensation de rassasiement confortable, de peur de ne plus en avoir. 

En encourageant une écoute attentive des besoins alimentaires et des sensations corporelles, les approches d’alimentation intuitive et consciente peuvent donc aider à développer un rapport plus sain avec l’alimentation, particulièrement bénéfique dans un contexte de DT1 où l’attention portée sur l’alimentation est importante. N’hésitez pas à en parler avec une nutritionniste si ces approches vous intéressent et que vous souhaitez en savoir plus.

Références :

  • Miller, Carla K et al. “Comparative effectiveness of a mindful eating intervention to a diabetes self-management intervention among adults with type 2 diabetes: a pilot study.” Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics vol. 112,11 (2012): 1835-42. doi:10.1016/j.jand.2012.07.036
  • Soares, Fabíola Lacerda Pires et al. “Intuitive eating is associated with glycemic control in type 2 diabetes.” Eating and weight disorders : EWD vol. 26,2 (2021): 599-608. doi:10.1007/s40519-020-00894-8
  • Irwin, Ashley et al. “Mindfulness, disordered eating, and impulsivity in relation to glycemia among adolescents with type 1 diabetes and suboptimal glycemia from the Flexible Lifestyles Empowering Change (FLEX) intervention trial.” Pediatric diabetes vol. 23,4 (2022): 516-526. doi:10.1111/pedi.13334
  • Wheeler, B J et al. “Intuitive eating is associated with glycaemic control in adolescents with type I diabetes mellitus.” Appetite vol. 96 (2016): 160-165. doi:10.1016/j.appet.2015.09.016

Écrit par: Sarah Haag RN. BSc.

Révisé par:

  • Nathalie Kinnard, M.Sc.
  • Amélie Roy-Fleming Dt.P., EAD, M.Sc.
  • Jacques Pelletier, Marie-Christine Payette, Claude Laforest, Sonia Fontaine, patients-partenaires du projet BETTER

Révision linguistique réalisée par: Marie-Christine Payette